France - Hôpital psychiatrique : la cigarette à la porte (30/01/2007)


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 Hôpital psychiatrique : la cigarette à la porte (30/01/2007)

Il fait froid, ce vendredi 26 janvier. Entre la salle fumeurs et le jardin, le choix est vite fait. La plupart des malades du centre psychiatrique Henri-Rousselle, à l’hôpital Sainte-Anne de Paris, préfèrent rester au chaud pour profiter de leur « sortie cigarette ». Jeudi 1er février, quel que soit le temps, patients et personnel soignant n’auront plus le choix, ils devront aller dans le jardin clôturé qui jouxte le service. Cette perspective ne semble troubler personne. A peine quelques « Ah bon ! » de la part de certains malades habitués au « local clopes ».
Depuis mai 2004, la cigarette a déjà été bannie des chambres, des salles communes et des couloirs de ce pavillon de psychiatrie générale. Une révolution qui s’est effectuée « sans heurts ni résistances majeures », assure le psychiatre Michel Fouillet. Ce service apparaît comme une exception dans des structures où l’usage du tabac fait partie intégrante du quotidien des malades. S’il est un lieu où l’application de la nouvelle législation antitabac semble particulièrement difficile, c’est dans les hôpitaux psychiatriques.
Ces dernières semaines, le docteur Fouillet a été plusieurs fois sollicité par des confrères d’hôpitaux de province curieux de savoir comment il a procédé. « Notre démarche n’a été ni idéologique ni hygiénique », insiste le médecin. Une conjonction de facteurs a permis au projet d’aboutir : le ras-le-bol des agents de service face à la saleté engendrée par le tabagisme, des lettres de familles faisant part de leur étonnement face à la tolérance vis-à-vis du tabac, un pavillon rénové qui se détériorait à vue d’œil, une approche globale de la personne malade qui s’accommodait mal de l’absence de réflexion face à la dépendance tabagique.
« Avant, dès le matin, c’était clope sur clope, la salle commune était envahie de fumée, les sièges, le lino, tout était abîmé par des brûlures de cigarette, sans compter le problème des départs de feu dans les poubelles », se souvient Francine Magna, infirmière. « La salle commune était si enfumée qu’on avait du mal à repérer les patients », se rappelle sa collègue Aline Szabo, aide-soignante.
Il a fallu trois mois de réunions pour vaincre les craintes des personnels, parler avec les patients et mettre en place, avec l’aide d’un tabacologue, l’accès à des substituts nicotiniques (patchs et gommes) pour compenser l’effet de manque.
Médecins, infirmières et aides-soignantes redoutaient que la privation de cigarettes entraîne une plus grande agitation des malades et augmente leur sentiment d’angoisse et d’anxiété. Que la frustration engendre des passages à l’acte. « On craignait les coups », résume Mme Magna.

Cartouches troupe
D’autant que la cigarette a toujours été vécue comme un vecteur relationnel. Certains médecins faisaient valoir une atteinte à la liberté individuelle et la fin d’un plaisir pour leurs malades. « J’ai entendu beaucoup de conneries : « Ils n’ont que ça dans la vie », « C’est leur destin », « Ça les occupe », raconte le docteur Fouillet. Le tabac ne doit pas être un cache-misère institutionnel, nous n’avons pas à proposer à nos malades que la cigarette soit un recours à un non-investissement. »
Longtemps, le tabac a eu droit de cité dans les unités psychiatriques. « Jusque dans les années 1990, on disposait de cartouches de cigarettes Troupe, comme à l’armée, qu’on distribuait aux patients. C’était un moyen d’entrer en contact avec le malade mais aussi un moyen de transaction pour obtenir une bonne conduite », se souviennent les infirmières. Puis les malades ont dû s’acheter leurs cigarettes ou se les faire apporter par leurs familles. Ils fumaient partout et tout le temps.
Depuis 2004, dans ce service de Sainte-Anne, les patients en unité ouverte doivent se rendre dans le jardin ou dans la salle fumeurs pour griller une cigarette. Quant à ceux de l’unité fermée (hospitalisés sous contrainte), leurs paquets et briquets sont désormais cachés dans des boîtes au poste de soins. Des « sorties tabac » sont organisées pour eux, environ six fois par jour, en fonction de leur état clinique et de la disponibilité du personnel. « Ces sorties font partie des soins. Ce sont des moments pendant lesquels on parle beaucoup avec les patients parce qu’on n’est ni appelé ni dérangé, témoigne Mme Magna. Nous ne sommes pas là pour que nos patients arrêtent de fumer mais pour faire respecter la loi. »
Infirmières et aides-soignantes apprécient leur nouveau cadre de travail. « On a un service de psychiatrie propre et agréable », reconnaît l’une d’elles.
Elles n’ont dû faire face à aucune tension majeure. « Cela a été beaucoup plus facile que ce qu’on imaginait, on n’a pas eu besoin d’augmenter les traitements », assure Mme Magna. « C’est une expérience très positive qui a eu un effet fédérateur au sein de l’équipe », se félicite le docteur Fouillet.
Une démarche qui prouve, selon lui, qu’il faut « arrêter de toujours traiter la psychiatrie à part ».
L’intégralité de cet article sur http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3238,36-861413,0.html

Sandrine Blanchard LE MONDE 30/01/2007
Transmis par le Dr Christian Rigaud (F-89)


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