Tunisie - Dix ans de loi anti-tabac … : qu’est-ce qui a changé ? (29/05/2008)


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 Dix ans de loi anti-tabac … : Qu’est-ce qui a changé ? (29/05/2008)

La Journée mondiale anti-tabac est pour le samedi 31 mai. Nous avons jugé opportun de nous adresser à un spécialiste de la question, le Dr. Elyès Hassine, pneumologue tabacologue, qui a bien voulu, sur trois chapitres, nous faire un état des lieux.
Parce que le tabac est un grand problème de santé publique, le législateur tunisien a élaboré depuis exactement dix années une loi anti-tabac, c’est la loi n°98-17 du 23 février 1998 relative à la prévention des méfaits du tabagisme. Cette loi, entrée en vigueur une année plus tard, vise à protéger les fumeurs passifs et interdire toute publicité du tabac.
Nous avons utilisé ces mêmes colonnes depuis quelques années pour parler du tabac, de ses ravages, de la loi, de la convention-cadre internationale et de la lutte anti-tabac. En mars 2003, nous avions dressé un bilan des 5 premières années de la loi anti-tabac, son impact et les perspectives de son application. Nous essayons de dresser dans cet article le bilan d’une décennie de législation spécifique.

Rappel de la loi anti-tabac
Afin de rafraîchir la mémoire des fumeurs et de leurs victimes, un bref rappel de cette loi s’impose. La loi anti-tabac n°98-17 stipule dans l’article 2 qu’il est interdit de faire d’une manière directe ou indirecte de la propagande ou de la publicité en faveur du tabagisme ou ses produits. L’article 4 l’interdit au profit des mineurs et l’article 8 impose l’apposition sur la couverture extérieure de la composition intégrale du produit tabagique, l’article 10 interdit le tabagisme dans les lieux à usage collectif.
Le décret n°98-2248 du 16 novembre 1998 fixe les lieux affectés à l’usage collectif dans les lesquels il est interdit de fumer. Dans son article 3, ce décret précise la possibilité d’aménager des espaces réservés aux fumeurs ; enfin, son article 13 explique les sanctions encourues la première fois et en cas de récidive.

Qu’est-ce qui a changé depuis l’instauration de la loi ?
Jusqu’à ce jour, cette loi « orpheline » n’a pas été respectée, un étranger visitant notre pays, ne peut imaginer qu’il existe une loi anti tabagique en Tunisie.
Afin d’analyser les conséquences de la loi anti tabagique, il faut distinguer deux notions importantes, la première : comment a été et a évolué le respect de la loi, la seconde : durant ces dix années de législation et d’éducation sanitaire, y a-t-il eu un changement du comportement du fumeur vis-à-vis du tabac ? Dans quelles proportions cette loi a influencé la consommation dans notre pays ? Combien de personnes ont pris des décisions et se sont libérées de la dépendance ?
La majorité des sondages et des enquêtes à l’échelle nationale n’ont pas montré de baisse significative de la consommation tabagique, au contraire, on assiste à une stabilisation des indices épidémiologiques, ce qui démontre que les Tunisiens plus nombreux en population depuis une décennie, fument avec presque la même intensité, le pourcentage est probablement le même mais, en chiffre absolu, la consommation paraît plus importante. Cette surconsommation est l’apanage du jeune surtout de sexe féminin.
Dans cette catégorie d’âge, l’impression qui se dégage est que le jeune comme dans d’autres types de comportements sociaux ne se soucie pas ou peu des conséquences du tabac pensant toujours à son invulnérabilité et paraît complètement distancé par rapport à cette législation.
L’existence d’une loi anti tabagique est à l’évidence sans intérêt dans la mentalité actuelle du Tunisien. Peu de choses ont changé depuis dix années.
Tout d’abord, il y a lieu de remarquer qu’on assiste à un changement progressif des mentalités, la culture du « non-fumeur » commence à frapper à certaines portes et particulièrement dans certains foyers familiaux où une meilleure compréhension du « risque tabac » est de plus en plus constatée, nous avons senti une prise de conscience nette des dangers et des effets néfastes de cette drogue. Des conséquences des programmes d’éducation sanitaire et d’hygiène respiratoire, cette prise de conscience est ressentie auprès des parents fumeurs, la soustraction des enfants au tabagisme passif est de plus en plus rapportée, les enfants eux-mêmes, plus instruits, demandent cette éviction à leurs parents et les enfants sont de plus en plus absents dans les soirées enfumées. Cette attitude est appréciable quand on sait que le tabagisme passif est pourvoyeur d‘asthme, première urgence médicale de l’enfant.
Sur un autre plan, nous avons remarqué la réduction des espaces fumeurs dans un certain nombre d’endroits dont la restauration, une surveillance plus rapprochée du tabagisme dans un grand nombre de structures sanitaires publiques et privées.
Il faut aussi noter les acquis de l’expérience de certaines entreprises comme les sociétés de transport (dont les interdictions de fumer datent depuis plus de 30 ans), les lois internes contre le tabagisme dans certaines institutions et l’installation de consultation anti tabagique intégrée au sein de quelques grandes entreprises. A remarquer aussi les comportements évolués des Tunisiens vis-à-vis de l’environnement et leur sensibilité aux problèmes de pollution, de la couche d’ozone avec d’avantage un intérêt aux nouvelles technologies de l’environnement et de la protection du milieu. Dans ce sens, il faut inculquer aux populations la culture « non-fumeur » et inclure le fléau tabagique dans leurs préoccupations quotidiennes.
Il faut mentionner également, la tendance actuelle des institutions scolaires à la lutte anti-tabac et la mobilisation de plus en plus fréquente et l’organisation de manifestations sur le thème tabagique. Les centres de santé reproductive réservent des espaces pour les fumeurs où des consultations spécialisées sont proposées.
Certaines associations et entreprises incluent souvent ce fléau dans l’éducation de leur personnel et la médecine du travail est très présente dans le cadre de ces activités. Rappeler les méfaits du tabac et les méthodes du sevrage ainsi que le contenu de la loi doivent être les grands axes de toutes ces actions.
Ce dont on est sûr, c’est que globalement, le regard et la position du Tunisien vis-à-vis du tabac ont beaucoup changé depuis quelques années. Ce n’est plus le fumeur heureux de jadis ni celui qui se vante par cette habitude dont il est conscient de la nocivité. Il est aujourd’hui très clair que cette intoxication est caduque et les multiples scènes de la vie courante et les « drames tabagiques » observés chaque jour dans nos structures sanitaires sont autant de preuves tangibles de l’effet destructeur de cette drogue, de plus en plus délaissée en Occident. L’étape suivante, indispensable et inévitable, est le passage de l’état de conscience à l’état d’action, il n’y a qu’un pas à franchir.

Dr. Elyès Hassine Le Quotidien (Tn) 29/05/2008
http://www.africatime.com/tunisie/nouvelle.asp?no_nouvelle=403744&no_categorie=

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