– Tabagisme : vivre tout en se tuant lentement (13/03/2010)
Ils sont nombreux ceux qui, après avoir touché à la première cigarette, ne parviennent plus à s’en départir. Comment y parvenir ? Comment arrêter de fumer ? Tout un processus selon les spécialistes.
Il n’avait pas prévu ce qui lui arrive actuellement. K. Serge voulait tout juste faire comme ses amis. Pendant les premiers instants, tenir une cigarette allumée entre le pouce et l’index, prendre une bouffée et rejeter une partie de ce gaz, était le geste qui le fascinait. « Au cours de la journée, je fumais tout juste 3 cigarettes. Une le matin avant même de me rendre au garage, une après le repas de midi et une autre le soir, avant de me mettre au lit. Mais de 3 cigarettes par jour, je me retrouve aujourd’hui à 1 paquet, avec des toux grasses. Après une visite chez le médecin, il m’a expliqué que cette toux est due à la cigarette. C’est ainsi que je suis repassé le voir afin qu’il puisse m’aider à arrêter la cigarette », explique Serge, la voix à peine audible. Elles ont choisi sans le savoir de se tuer lentement. D’une simple envie de frimer ou par mimétisme, ces personnes deviennent finalement accro du tabac. Et malheureusement, cette dépendance du tabac atteint un grand nombre de personnes. En Côte d’Ivoire, selon les données de l’OMS, la prévalence tabagique est de 22 % chez les hommes et de 5 % chez les femmes. Et 2 jeunes sur 10 fument dans le secteur informel, à raison de 5 000 décès par an. Concernant les facteurs favorisant cette situation, les spécialistes avancent diverses raisons. Il s’agit notamment de l’entourage à 96 %, de la curiosité à 56,4 %, du mimétisme à 37,5 %, et des publicités 19,2 %. Et lorsque comme par enchantement, ces personnes commencent par ressentir quelques malaises, elles se rendent chez un médecin dans l’optique d’arrêter cette dépendance au tabac.
Le sevrage
« Si vous voulez avoir longue vie, je vous demande de venir me voir afin d’arrêter de fumer, sinon vous risquez de laisser des orphelins ». C’est en ces termes que Dr Angaman K. Ambroise, tabacologue, recevait ces patients le 23 février au dispensaire municipal de M’badon. Selon ce spécialiste, le sevrage tabagique est tout d’abord une question de volonté. L’individu qui fume décide d’arrêter de fumer. Et pour ce faire, il se rend soit chez le pneumologue soit le tabacologue qui l’y aide », explique le spécialiste qui soutient que le sevrage tabagique commence par la sensibilisation. « De nombreuses personnes s’adonnent au tabac parce qu’elles ne savent pas les dangers qu’elles courent. Lorsque nous les recevons, nous avons un entretien franc avec elles, au cours duquel nous leur expliquons les dangers de la cigarette. Les dangers pour elles et pour l’entourage. Parce qu’il faut bien que les gens comprennent qu’en fumant, ils s’exposent à l’accélération de la fréquence cardiaque, à l’aggravation de l’asthme, à l’augmentation de la teneur du sang en oxyde de carbone, etc. Et outre les maladies cardio-vasculaires ou les broncho-pneumonies qu’ils risquent plus tard, ils constituent un danger pour leur entourage qui inhalent la fumée rejetée par le fumeur », explique Dr Angaman. Le tabacologue précise qu’il faut faire comprendre au candidat au sevrage qu’il y a deux types de tabagisme. « Le tabagisme actif qui est l’intoxication volontaire d’un sujet par l’usage personnel du tabac, et le tabagisme passif qui est l’intoxication involontaire par la fumée des autres. Encore appelé tabagisme environnemental, une gravité longtemps méconnue ou négligée. La fumée qui s’échappe du bout de la cigarette (courant secondaire) d’un fumeur est 10 fois plus toxique que la fumée qu’il inhale lui-même », précise Dr Angaman. Une idée soutenue par le Dr Koffi Nestor chargé d’étude au Programme national de lutte contre le tabac (Pnlt). Ce dernier précise qu’il faut expliquer au candidat au sevrage que le tabac contient plus de 4 000 éléments toxiques classés en quatre groupes : il s’agit des irritants qui sont les acroléines (les plus nombreux : il y a ceux qui s’élaborent au niveau du foyer de la cigarette, ceux qu’ont rajoutent dans la culture, dans la fabrication, dans la préparation et la conservation du tabac) qui sont généralement responsables des bronchites ou des pneumo-bronchites ; les radicaux libres qui se composent de près de 1 000 gaz nocifs (monoxyde de carbone, dioxyde de carbone, …) ; des substances cancérigènes que sont les hydrocarbures (les goudrons) responsables des cancers ; et les alcaloïdes (les plus dangereux) une douzaine dont le chef de file est la nicotine, cause des maladies cardio-vasculaires.
« Mais il faut surtout expliquer au candidat au sevrage que c’est cette nicotine qui est la cause de la dépendance, c’est une substance hautement dépendogène », soutient Dr Koffi. Les spécialistes révèlent qu’il faut quelquefois leur montrer les bouts des doigts et les plantes des pieds qui sont devenus noirs. « Il convient par la suite de leur dire qu’ils ne voient que ce qui est visible. C’est en ce moment qu’il faut passer à la projection des poumons et du cœur d’une personne saine et d’un fumeur. « A la vue de ces images en plus des premiers conseils qui leur ont été donnés, certains fumeurs déjà prennent déjà la décision d’arrêter », soutiennent les spécialistes. Mais pour d’autres ayant déjà atteint l’étape de dépendance (statut qui s’évalue à travers le test de Fagerström (les détails de ce texte sont ci-dessous), il faut en plus des conseils, leur prescrire des médicaments qui généralement sont des substituts nicotiniques. « Il s’agit des gommes, des patches 16 h et des comprimés qui permettent tout doucement de leur enlever l’envie de fumer », explique Dr Boko Alexandre, du service de pneumologie du CHU de Cocody et par ailleurs président de l’ONG ‘’Sauvons le poumons’’. « Les patch 16 h sont comme des sparadrap contenant de la nicotine. Ils sont placés sur le bras et permettent de remonter le taux de nicotine dans l’organisme du fumeur. Il n’aura donc plus besoin de fumer une cigarette étant donné que l’élément dont il manque se trouve dans le patch. Et suite les comprimés et les gommes qui contiennent également de petites doses de nicotines mais qui surtout enlèvent aux fumeurs l’envie de tenir quelque chose entre les dents », soutient le médecin.
Un candidat au sevrage qui, selon Dr Boko, suit cette prescription peut parvenir au sevrage 1 mois et demi plus tard ou au maximum après trois mois de traitement. Cependant, le spécialiste avoue que le taux de succès est de 20 à 30 %. Pas parce que la méthode n’est pas bonne, mais certainement parce que, comme le signale le Dr Angaman, "les doses de nicotines ne sont pas respectées dans les fabrications de cigarette dans les pays en voie de développement’’. « Dans les pays développés, le taux de nicotine dans les cigarettes varie de 0,7 mg à 3 mg. Mais dans nos pays en voie de développement, ce taux peut aller jusqu’à 4 % », avoue-t-il.
Et malheureusement, les personnes qui ne parviennent pas à parvenir au sevrage avec la méthode qui leur est donnée, s’exposent à de nombreuses conséquences.
Les conséquences du tabagisme
Hormis les conséquences légères précitées, il y a principalement des maladies : cancéreuses ; cardiovasculaires ; respiratoires ; dermatologiques.
Concernant les pathologies cancéreuses, elles sont provoquées par les toxines cancérigènes. Il s’agit des cancers du poumon ; du cancer buccal. Il y a également les maladies cardiovasculaires. Le tabac est incriminé comme facteur de risque de survenue de maladies comme : HTA et ses complications qui sont les accidents cardiovasculaires.
Au titre des pathologies respiratoires et ORL, il faut noter que le tabac favorise où aggrave de nombreuses maladies comme l’asthme ; la bronchite chronique la broncho-pneumopathie chronique obstructive.
Le tabac a également des conséquences dermatologiques. Il s’agit de l’apparition précoce de rides, mauvaise cicatrisation ; de perte de l’élasticité de la peau.
Et enfin, au plan endocrinien, le tabagisme a un impact négatif sur l’activité sexuelle et la fécondité. Des chercheurs ont établi que le nombre de spermatozoïdes et la production d’ovules étaient réduits respectivement chez l’homme et chez la femme consommateurs de tabac. En somme, le tabac favorise la stérilité. D’autre part, il entraîne l’impuissance sexuelle. Ce sont autant de maux qui sont dus au remplacement de l’oxygène (qui permet une bonne circulation du sang) par le monoxyde de carbone.
Touré Yelly L’expression (Abidjan Côte d’Ivoire) 13/03/2010
http://news.abidjan.net/h/359165.html?n=359165
Quelques inexactitudes journalistiques … et un manque de FMC pour d’autres ! (Ndlr)