– La pyramide alimentaire revisitée (01/11/1999)
Le modèle de la pyramide alimentaire s’est imposé comme étant le porte-drapeau de la notion d’équilibre alimentaire. La nutrition est une science en pleine évolution, et les messages qu’elle prodigue doivent être ciblés en fonction des priorités actuelles pour améliorer la santé, mais aussi de la façon dont ces messages sont interprétés, compris, retenus.
C’est pour améliorer ces balises nutritionnelles que La Pyramide Alimentaire, réalisée conjointement par l’Institut Paul Lambin (Haute École Léonard de Vinci) et Diffu-Sciences, a été revisitée.
Des pyramides, il en existe beaucoup, plus rares sont celles qui sont conçues et développées sans faire la promotion de l’un ou l’autre produit de marque. Le concept même de la pyramide alimentaire a ses défenseurs, mais aussi ses détracteurs.
Les défenseurs y voient un outil de base qui sert de support éducatif pour aborder l’alimentation équilibrée, et dont la seule illustration suffit déjà à introduire l’existence des différentes familles alimentaires, et le fait qu’il existe un rapport de force entre ces familles (notion de proportions).
Les détracteurs critiquent essentiellement la trop grande place allouée à la famille des céréales et féculents.
Pour ou contre la pyramide ?
Dans ce débat, « pour » ou « contre », on retrouve en fait ceux qui utilisent la pyramide comme un outil reflétant les recommandations nutritionnelles en vigueur, et ceux qui sont généralement partisans du « low-carb », c’est-à-dire d’une réduction de la proportion d’énergie allouée aux glucides, ce qui est contraire aux recommandations nutritionnelles, tant nationales qu’internationales (OMS).
Parler de quantité… sans chiffres
Les recommandations nutritionnelles n’ayant pas fait l’objet de bouleversements profonds ces dernières années, la structure de la pyramide n’a pas changé.
Le principe reste très simple : plus la famille occupe une place importante dans le graphisme, plus son poids est important dans l’assiette (ou le verre !). D’autres options sont possibles, par exemple parler de volume, de densité énergétique… mais celle du poids est la plus facile à utiliser.
Précisons que cette pyramide exprime les recommandations nutritionnelles d’une alimentation équilibrée, et non celles qui seraient préconisées dans le cadre d’un régime particulier. Par souci de simplification des messages, les quantités ont été remplacées par des fréquences d’apparition des aliments au cours de la journée (des événements de consommation), alors que les chiffres plus précis sont utilisés par les diététiciens.
L’activité physique au quotidien
L’activité physique représente le principal compartiment modulable de la dépense énergétique. Et notre mode de vie de plus en plus sédentaire contribue largement au déséquilibre entre les apports énergétiques et les dépenses.
L’augmentation du niveau de l’activité physique constitue un objectif de santé publique qu’il est intéressant de coupler (sans toutefois le mélanger) aux conseils nutritionnels. L’activité physique n’est cependant pas intégrée dans la pyramide, parce qu’une pyramide alimentaire reste un schéma dont la structure concerne avant tout ce qui est mis dans l’assiette.
L’objectif premier est bien d’augmenter le niveau d’activité physique au quotidien, et non d’espérer transformer toute la population en de grands sportifs (ce qui serait utopique).
De plus, les bienfaits de l’activité physique pour la santé sont nettement plus importants en pratiquant une dépense correspondant à une marche rapide pendant une demi-heure par jour (5 jours par semaine), qu’en dépensant la même quantité d’énergie lors d’une pratique sportive intensive pratiquée une fois par semaine. Il ne faut pas être sportif pour avoir une vie physique active, et ce n’est parce que l’on pratique du sport une ou deux fois par semaine, que l’on peut être sédentaire les 5 ou 6 autres jours de la semaine ! C’est pour insister sur le caractère accessible de l’objectif « bouger au quotidien » que sont représentées surtout des activités faciles à intégrer dans la vie de tous les jours, comme la marche, monter des escaliers et même promener un chien.
De l’eau, à volonté
La base de la pyramide est représentée par les boissons non sucrées, avec une emphase particulière pour la seule boisson qui soit physiologiquement indispensable : l’eau.
Les boissons non sucrées peuvent être comprises comme les boissons dépourvues de sucres, comme le café, le thé, les tisanes… ou les boissons dépourvues de goût sucré (dans ce cas, cela exclu les boissons « light »). Si le café ou les boissons « light » peuvent bien entendu contribuer à fournir de l’eau sans fournir d’énergie, elles ne peuvent pas être assimilées à de l’eau pure (de distribution ou en bouteille), qui peut être bue « à volonté ».
Privilégier l’eau comme boisson s’inscrit également dans un objectif préventif visant à lutter contre l’excès énergétique et ses répercussions sur le poids, ainsi que le respect du développement du goût chez l’enfant.
Céréales et féculents : + de complet !
Les céréales et les féculents restent le socle solide le plus important de l’édifice. Il s’agit de la principale source d’énergie d’une alimentation équilibrée et, en poids aussi, ils sont la famille qui pèse le plus lourd dans l’assiette.
La proportion d’énergie issue des glucides complexes étant toujours trop faible, il y a lieu de souligner la place de cette famille dans une alimentation équilibrée. Le message principal « À chaque repas » a pour objectif d’assurer la présence de cette famille à chacun des 3 repas principaux.
Contrairement à la version précédente, la pyramide alimentaire attire désormais l’attention sur l’importance de privilégier, au sein de cette famille, les produits céréaliers complets, dont les atouts santé par rapport à leurs homologues raffinés sont largement documentés.
Fruit et légumes
La majoration de la consommation de fruits et légumes et un objectif prioritaire en matière de santé publique. Selon les recommandations de l’OMS, l’apport en fruits et légumes devrait se situer entre 400 et 800 g, sans autre précision sur la répartition entre les fruits et les légumes. Le rapport légumes/fruits a toutefois tout intérêt à être supérieur à 1, ce qui explique que le compartiment des légumes est plus important que celui des fruits.
Pour la plupart des gens, atteindre 400 g de fruits et légumes est déjà un fameux défi. Le message « 5 fois par jour » et « à chaque repas » a inspiré du « 5 par jour » qui est utilisé dans plusieurs pays, et qui correspond à 5 fois 80 g (partie comestible) pour atteindre les 400.
Parler de « 5 fois » introduit également la notion de diversité au sein de cette famille (fruits, légumes cuits, crudités), ce qui ne serait pas le cas avec seulement « à chaque repas ».
Il en faut à chaque repas, et même à plusieurs reprises lors d’un repas (ex : soupe de légumes puis fruits ; crudités puis légumes cuits… et/ou en collation.
Produits laitiers
Les calculs de journées montrent que pour atteindre les apports recommandés en calcium, les produits laitiers doivent être représentés au moins à raison de 2 fois par jours (deux portions), pour des apports de 900 mg (adultes) et 3 fois par jour lorsque les ANR sont de 1 200 mg/jour (adolescents, femmes à partir de la ménopause, personnes âgées). D’où le message « 2 à 3 fois par jour », en précisant qu’une de ces prises doit s’effectuer sous forme de fromages (ce qui constitue aussi une façon de ne pas puiser tout son calcium laitier dans produits riches en sucres ajoutés).
Viande, volaille, poissons, œufs, charcuterie
Ces sources de protéines animales sont utiles, mais souvent présentent en quantités inutilement élevées.
Le message « 1 à 2 fois par jour » souligne ainsi leur utilité quotidienne tout en attirant l’attention sur le fait qu’ils ne doivent pas être consommés à chaque repas (contrairement aux céréales et féculents et aux fruits et légumes).
Matières grasses tartinables et de cuisson
Priorité est accordée à la quantité, en montrant que cette famille ne doit pas être inexistante, mais discrète, tout en introduisant la notion de variété des sources. Bien entendu, il n’est pas possible au travers d’une ou deux lignes d’un tel modèle éducatif d’aborder en détail la qualité de la ration lipidique, notamment avec les sources d’oméga-3 etc. Ceci doit faire l’objet d’explications orales ou écrites complémentaires.
Les « occasionnels »
Sont regroupés ici les aliments qui, contrairement aux autres familles, ne sont pas indispensables à l’équilibre alimentaire (et sont même plus souvent facteurs de déséquilibre). Et si certains professionnels de la santé voudraient les rayer de la carte des recommandations, ils sont cependant une réalité, sont très prisés et doivent donc être « gérés ». On ne les consomme pas pour y puiser de précieux nutriments, mais pour se faire plaisir (ce qui ne dispense pas de se faire plaisir avec d’autres étages de la pyramide).
Le terme « occasionnels » a été privilégié parce que le seul nom introduit une notion de fréquence de consommation nettement plus espacée que pour les autres prises alimentaires. Il est complété d’un message quantitatif privilégiant la modération (« en petites quantités »).
L’objectif n’est pas de stigmatiser des produits qui peuvent trouver leur place dans une alimentation équilibrée, mais d’arriver à ce que la place accordée à ces aliments gras et/ou sucrés soit au moins effectuée en connaissance de cause.
L’alcool
Les recommandations concernant l’alcool restent 0 à 4 % de l’apport énergétique total. En pratique, cela signifie que l’on peut tolérer quotidiennement 1 à 2 verres de bière (type pils) ou de vin. L’alcool n’est cependant pas repris dans le visuel de base de la pyramide, pour que le modèle puisse s’appliquer à une cible plus large comme les enfants, et pas uniquement aux adultes.
* La Pyramide Alimentaire à été développée par Diffu-Sciences et la section diététique de l’Institut Paul Lambin (Haute école Léonard de Vinci, Bruxelles).
Diffu-Sciences - Rue de Rixensart, 18 Bat 17 bt3 - 1332 GENVAL - Belgique - Tél. + 32 2 653 07 81
Les étages remis en cause ?
L’étage des céréales reste sous celui des fruits et légumes. Pourquoi ? Tout simplement parce que leur poids moyen dans une alimentation équilibrée est plus important que l’objectif des 400 g de fruits et légumes. Ainsi, pour atteindre 35 % de l’énergie sous forme d’amidon (ce qui est un objectif minimal), cela correspond, pour un bilan énergétique de 2 000 kcal (femme adulte peu active) à : 350 g de pain ou 625 g de pâtes cuites ou 1 040 g de pommes de terre. Ces portions sont plus élevées pour couvrir les besoins d’une femme moyennement active ou ceux d’un homme, même peu actif (2 500 kcal).
Nicolas Guggenbühl, diététicien nutritionniste
http://www.healthandfood.be/image/fr/pdf/doc_pyramide.pdf