– L’apport des TCC dans l’aide à l’arrêt
Dans le sevrage tabagique, les thérapies cognitives et comportementales (TCC) peuvent être utilisées seules ou associées aux traitements pharmacologiques. Elles sont le plus souvent conduites dans les services d’addictologie-tabacologie, le fumeur payant sa consultation à l’hôpital, avant d’être remboursé. En libéral, la TCC n’est prise en charge par l’assurance-maladie que si elle est pratiquée par un psychiatre ou un médecin formé.
La triple dépendance
La notion de triple dépendance est essentielle à expliquer aux fumeurs souhaitant s’arrêter.
> La dépendance psychologique résulte de la recherche automatique des effets psychoactifs de la nicotine (plaisir ; action anxiolytique, sédative, antidépressive ; stimulation intellectuelle ; coupe-faim). Elle réagit aux traitements pharmacologiques (varénicline, bupropion) et aux TCC.
> La dépendance comportementale correspond au réflexe conditionné créé par l’association du plaisir de la cigarette à des situations précises. Elle relève des TCC, en particulier des techniques de dissociation.
> La dépendance physique à la nicotine est liée à la sensation de manque après chaque cigarette. Elle entraîne l’augmentation progressive de la consommation et peut être efficacement traitée par la substitution nicotinique.
Les indications des TCC
> À un stade de dépendance léger et moyen (Fagerström 3 ou 4), un traitement exclusivement par TCC peut être proposé aux fumeurs très motivés.
> Pour les fortes dépendances (Fagerström 5 et plus), un traitement par substitutifs est nécessaire, au moins temporairement. Dans un premier temps, on applique la technique comportementale – essentiellement dissociative – en s’aidant de substitutifs oraux, puis, après l’arrêt du tabac, on poursuit la prise en charge en TCC seule si le sujet le souhaite.
Les consultations
Chaque séance dure environ 60 minutes, au rythme habituel d’une séance par semaine ou par quinzaine.
> À la fin de la première séance, on demande au fumeur de faire « un carnet de bord » sur lequel il note, sur une journée de travail et sur une journée de repos, pour chacune des cigarettes fumées, l’heure, l’envie de la fumer sur une échelle de zéro à dix, la situation du moment, l’émotion éventuellement associée soit avant, soit pendant, soit après (stress, colère, tristesse, joie, convivialité ...) et les pensées associées pendant, avant ou après.
> À la deuxième consultation, à partir de ce carnet, on détermine avec le fumeur, pour chacune des cigarettes, le type de dépendance correspondant et la stratégie applicable. La première cigarette est généralement plutôt liée à la dépendance physique. On explique l’utilité d’un substitut pour ces premières cigarettes du matin. En cas de refus, on conseille de repousser progressivement le moment de cette première cigarette.
> Pour la dépendance comportementale, on applique des techniques de dissociation du stimulus et de la réponse pour supprimer les habitudes. Pour les cigarettes qui sont fumées avec le café, on demande au fumeur de continuer à fumer cette cigarette-là, mais 5 à 10 minutes après le café, puis on augmente ce délai. S’il fume en compagnie, on lui demande de fumer, mais seul à l’extérieur, etc. Peu à peu, le fumeur supprime ainsi de lui-même certaines cigarettes, car il n’y aura plus le même plaisir. Cette méthode demande une très forte motivation.
> La dépendance psychologique du fumeur est souvent liée au stress, à la colère, à la tristesse, etc. Dans ce cas, on emploie une technique de relaxation, en modifiant le rythme respiratoire. L’inspiration de la fumée se fait de façon lente et prolongée, sur un mode plus ventral, et l’expiration est également plus lente. On propose au fumeur de mettre en place d’autres techniques, type training autogène de Schultz, relaxation minute, etc.
> Pour ceux qui fument parce qu’ils ont des problèmes d’émotions liés à une difficulté à les exprimer, on utilise des techniques d’affirmation de soi.
Les consultations suivantes
À chaque consultation, on analyse les résultats enregistrés et, en cas de difficultés rencontrées, on réfléchit à leurs causes et l’on envisage d’autres stratégies. Le nombre de consultations dépend du nombre de cigarettes fumées et aussi de la vitesse à laquelle le sujet veut aller.
> Après l’arrêt du tabac, on continue de voir le sujet. On le déculpabilise s’il a fait un faux pas. On cherche les facteurs de rechute et l’on essaie d’anticiper les situations problématiques. Le suivi se fait sur un mois ou deux, mais certains patients demandent à être suivis un an.
> En cas de rechute du fait d’une décompensation sur un mode dépressif ou anxieux, ou bien d’un trouble du comportement alimentaire, on pratique des TCC d’une manière classique sur le trouble en question, éventuellement associées à un traitement psychotrope.
Conflit d’intérêts
Le Dr Stéphany Pelissolo déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts.
Dr Marc Kreuter (rédacteur, fmc(à)legeneraliste.fr ) N°2424 du 12/10/2007
D’après un entretien avec Stéphany Pelissolo (psychothérapeute spécialisée dans les TCC, service de tabacologie et d’addictologie, CHU Paul-Brousse, 12 av. Paul Vaillant-Couturier, 94804 Villejuif cedex. Courriel : stephany.pelissolo(à)pbr.aphp.fr).
Remplacez (à) par @
http://www.legeneraliste.fr/layout/Rub_FMC.cfm?espace=FMC&id_rubrique=101843&id_article=16935
Selon le Pr. Gilbert Lagrue, on ne parle plus aujourd’hui que de deux dépendances : psychique et physique (Ndlr).