– Le tabac à priser ou neffa (30/05/2006)
Dans un pays comme le nôtre, où se retrouvent tradition et modernité, l’effet de mode a, certes, augmenté la consommation, mais n’a pu supprimer certaines formes de tabagisme peu connues en Europe, comme le tabac en poudre, mode encore fréquent en milieu rural : 6 usagers sur 7 et chez les sujets âgés. La proportion des usagers de neffa est actuellement inférieure à 10 % des tabagiques et augmente en milieu rural jusqu’à 20-30 %, où elle n’est pas l’apanage des hommes, puisque les femmes en consomment.
La neffa peut contenir des impuretés et des conservateurs non toujours dénués de risque. En plus, c’est un tabac frais qui n’est pas allumé ou brûlé, favorisant le développement de champignons.
Les études montrent une baisse très significative durant les dernières années de l’utilisation de la neffa jugée très archaïque et cela est en rapport avec le développement socioéconomique, culturel et sanitaire.
L’analyse minéralogique a essentiellement mis en évidence la présence de silice libre (Si O2) à un taux de 2,8 %. D’autres éléments tels que le fer, l’aluminium et le calcium ont été trouvés dans les mêmes proportions.
La neffa est pourvoyeuse des mêmes problèmes de santé que la cigarette, mais avec une toxicité bucco-gingivo-dentaire supérieure et la possibilité de développement de maladies dystrophiques en rapport avec l’irritation chronique, comme les dysplasies gingivales, les atteintes de la dentition avec caries et chute de dents, les infections en tous genres de la cavité buccale, avec des aphtes.
Reste que les atteintes les plus graves sont les pathologies tumorales, touchant aussi bien la langue que les gencives et la paroi buccale et les glandes salivaires.
En plus de ces effets, la neffa admet une pathologie propre : si pour les priseurs, la symptomatologie est engendrée par un mécanisme d’irritation locale des bronches et d’empoussiérage, chez les chiqueurs (non épargnés de bronchopathies chroniques), les mécanismes ne sont pas clairs.
Les conclusions de l’étude faite par l’équipe de l’Ariana sont que la poudre de tabac est à l’origine d’une entité pathologique réelle appelée « le poumon de neffa » (maladie individualisée en Tunisie) et qui est une broncho-pneumopathie chronique pouvant évoluer vers l’insuffisance respiratoire chronique, commençant au début sous forme d’un infiltrat réticulo-nodulaire des bases, qui évolue en fibrose kystique et une distension associée à une bronchopathie chronique.
Dr Elyès Hassine (Pneumologue tabacologue) La Presse de Tunisie
Journée mondiale sans tabac — Contribution, 30/05/2006
http://www.lapresse.tn/index.php?opt=15&categ=3&news=28670