– Dans l’atteinte pulmonaire et tabagisme modéré le risque de cancer varie avec l’ethnie (26/01/2006)
Le risque de cancer du poumon chez les fumeurs varie selon le groupe ethnique, comme le montre une étude de cohorte multiethnique réalisée chez près de 184 000 Californiens et Hawaïens suivis pendant huit ans. Les causes exactes de ces différences restent à déterminer.
« Les différences que nous avons relevées sur le risque de survenue d’un cancer du poumon semblent être plus apparentes à des niveaux de tabagisme faible à modéré (moins d’un paquet par jour) », précise pour « le Quotidien » le Dr Christopher Haiman (université de Los Angeles) dont l’étude est publiée dans le « New England Journal of Medicine ». « Ces écarts n’ont pas pu être expliqués par des différences entre les populations portant sur des facteurs de risque connus ou soupçonnés, comme l’alimentation, l’activité professionnelle ou le niveau socio-économique. »
« Les raisons en sont actuellement inconnues. Elles sont probablement dues à une association de facteurs génétiques et environnementaux qui varient d’une population à l’autre. De futures études évaluant les différences dans le métabolisme de la nicotine et des carcinogènes du tabac pourraient aider à mieux comprendre ces différences entre les populations… Du point de vue de la santé publique, ces résultats ne modifient pas le message selon lequel la vaste majorité des cancers du poumon peut être prévenue par l’élimination du tabagisme. »
Les statistiques américaines montrent que l’incidence du cancer du poumon est bien plus élevée chez les Noirs, et que les Américains d’origine asiatique et hispanique ont des taux plus faibles que ceux d’origine européenne. Le tabagisme varie aussi beaucoup entre ces populations.
Haiman et coll. ont recherché des variations ethniques du risque de cancer du poumon chez les fumeurs. Pour cela, ils ont analysé minutieusement les données recueillies sur près de 184 000 participants de l’étude d’une cohorte multiethnique.
Les participants, âgés de 45 à 75 ans, résidant en Californie ou à Hawaï, ont été enrôlés entre 1993 et 1996. Ils ont répondu à un long questionnaire détaillé (26 pages), comportant notamment leur origine ethnique : africaine-américaine, japonaise-américaine, latino-américaine, hawaïenne, indigène ou caucasienne. Les participants ont également donné des informations précises sur leur tabagisme présent et antérieur.
Ils ont été suivis de 1996 à 2001, période durant laquelle la survenue d’un cancer du poumon ou d’un décès était identifiée grâce aux registres administratifs. Ont été recensés, sur cette période de huit ans, 1 979 cas de cancer du poumon. Les investigateurs ont pu alors établir le risque de cancer du poumon selon l’intensité du tabagisme et l’origine ethnique.
Moins de 30 cigarettes par jour. Parmi ceux qui fument moins de 30 cigarettes par jour, les Africains-Américains et les Hawaïens indigènes ont des risques significativement plus élevés que les sujets des autres groupes.
Pour ceux qui fument moins de 10 cigarettes par jour, et ceux qui en fument entre 10 et 20, les risques relatifs varient de 0,21 à 0,39 parmi les Japonais-Américains et les Latino-Américains ; de 0,45 à 0,57 parmi les Caucasiens, par rapport aux Africains-Américains. Ces différences ethniques disparaissent chez les gros fumeurs, ceux qui dépassent les 30 cigarettes par jour.
Enfin, ces divergences de risque associé au tabagisme sont observées aussi bien chez les hommes que chez les femmes, et pour tous les types histologiques de cancer du poumon.
Pour le Dr Neil Risch, auteur d’un éditorial, « ces données suggèrent une interaction étiologique entre l’ethnie et l’exposition au tabac. On peut considérer les Africains-Américains et les Hawaïens indigènes comme les plus susceptibles aux effets cancérogènes de la fumée de cigarette, et les Japonais-Américains et les Latino-Américains comme les moins susceptibles ».
« New England Journal of Medicine », 26/01/2006, p. 333.
Dr Véronique Nguyen