– Le tabagisme facteur de risque de la polyarthrite rhumatoïde qu’en présence de certains gènes (01/01/2006)
Certains gènes situés au niveau du complexe majeur d’histocompatibilité (MHC) de classe II semblent jouer un rôle central dans la susceptibilité génétique à la polyarthrite rhumatoïde (PR). L’association entre cette maladie et les déterminants sérologiques HLA-DRB4 et DRB1 est connue depuis une vingtaine d’années. Elle se limiterait à certains sous-types de DRB4 et de DRB1 qui ont en commun une séquence (épitope ou motif) d’acides aminés.
De là est née la théorie de l’épitope partagé qui met en cause certains allèles HLA-DRB1. Les acides aminés qui leur correspondent sont situés dans une région moléculaire qui joue un rôle critique dans la liaison du MHC aux antigènes et leur présentation aux récepteurs des cellules T. Les gènes de l’épitope partagé sont cependant retrouvés chez des sujets qui ne seront pas touchés par la PR, ce qui plaide en faveur d’une interaction entre ceux-ci et l’environnement selon des modalités qui restent à établir.
Les effets du tabagisme qui est associé à une augmentation du risque de PR pourraient passer par cet épitope, comme le suggèrent les résultats d’une étude dans laquelle ont été inclus 407 sujets atteints de PR et 406 témoins atteints d’une pathologie articulaire mal définie. Le facteur rhumatoïde, les anticorps anti peptide citrulliné (anti-cyclic-citrullinated peptide-CCP) et les allèles HLA-DRB1 ont été systématiquement déterminés.
L’analyse des données a mis en évidence une interaction significative entre l’exposition au tabac et l’épitope partagé pour ce qui est de la présence des anticorps anti-CCP. Ainsi, la probabilité de la présence d’anti-CCP (en fait l’odds ratio, OR) est particulièrement élevée quand le tabagisme et l’épitope partagé sont associés, l’OR étant en effet de 5,27 (versus 1,07 en cas de tabagisme isolé et 2,49 en cas d’épitope partagé isolé). Aucune association de ce type n’a été mise en évidence dans le groupe témoin.
Les effets du tabagisme sur la genèse ou l’aggravation de la polyarthrite rhumatoïde pourraient passer par une interaction du type gènes-environnement qui s’exprimerait par le biais de l’épitope partagé HLA-DRB1. Cette hypothèse demande à être vérifiée, car, d’une part, elle émane d’une étude cas-témoins, d’autre part, la théorie de l’épitope partagé est loin de faire l’unanimité des chercheurs et des cliniciens.
Linn-Rasker SP et coll. : “Smoking is a risk factor for anti-CCP antibodies only in rheumatoid arthritis patients who carry HLA-DRB1 shared epitope alleles”. Ann Rheum Dis., 2006 ; 65 : 366-371.
Résumé en anglais : http://ard.bmj.com/cgi/content/abstract/ard.2005.041079v1
Dr Philippe Tellier http://www.jim.fr, 01/01/2006