– Arrêt du tabac pendant la grossesse (01/12/2006)
Alors qu’ils peuvent être proposés à la femme enceinte, en seconde intention, l’innocuité des substituts nicotiniques était mise en doute par une étude danoise. Réuni par l’Afssaps, un groupe de travail a rassuré et confirmé les recommandations de 2003.
Une étude danoise publiée en janvier 2006 a semé le trouble dans la communauté scientifique française. Elle portait sur la prescription des substituts nicotiniques chez la femme enceinte, qui veut arrêter son tabagisme. Elle posait des questions sur l’innocuité de ces traitements. Et, donc, remettait en cause la recommandation 2003 de l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé), qui indiquait : « L’objectif est de tendre vers un arrêt complet du tabac le plus tôt possible, sans recours aux traitements de substitution à la nicotine. Toutefois, des substituts nicotiniques peuvent être proposés à la femme enceinte en cas d’échec de la thérapie cognitivo-comportementale et de la prise en charge psychologique ».
En outre, en France, depuis 1997, « il est communément admis que l’exposition à la nicotine seule comporte moins de risques pour le fœtus que l’exposition à la fumée de cigarette ».
Que disait le travail danois ? Morales-Suarez-Valeza (« Obstet Gynecol » ; 107 : 51-57) ont mis en évidence une possible augmentation du risque malformatif lors de l’utilisation des substituts nicotiniques au cours du premier trimestre de la grossesse.
L’Afssaps a réagi en réunissant un groupe d’experts. Leur mission : réfléchir sur la pertinence ou non de donner des substituts nicotiniques au cours de la grossesse, en évaluant au mieux le rapport bénéfice-risque.
Les premières conclusions du groupe de travail ont été rendues à l’automne. Les experts « ne relèvent dans l’étude aucun élément solide à l’appui d’une augmentation du risque de malformation lié à l’utilisation des traitements de substitution nicotinique au cours du premier trimestre de la grossesse… En l’état des connaissances, poursuivent-ils, aucun risque de malformation ou de toxicité fœtale ne semble être imputable à l’utilisation des substituts nicotiniques au cours de la grossesse ». Ce constat est valable quelles que soient les formes pharmaceutiques considérées : patch, gomme à mâcher, cartouche pour inhalation buccale. Ils concluent donc que les recommandations de 2003 demeurent valables et applicables.
Une étude qui appelle de nombreuses réserves. Leur avis est fondé aussi sur une analyse du travail danois. A leurs yeux, « les conclusions alarmistes de cette étude appellent de nombreuses réserves… Ces informations doivent être confirmées du fait de problèmes méthodologiques rencontrés pour l’analyse épidémiologique ».
En conséquence, les informations contenues dans les RCP (résumé des caractéristiques du produit) sont toujours valables pour les substituts nicotiniques. La procédure européenne autorise le recours aux traitements substitutifs nicotiniques en cas d’échec du sevrage par des méthodes non pharmacologiques, chez les femmes enceintes fortement dépendantes, donc en utilisation en seconde intention.
D’ailleurs, les données précliniques chez l’animal ont conclu à une absence d’effet tératogène, mais à l’existence d’un retard de croissance fœtal en rapport avec des épisodes d’hypoxie-ischémie, ce que confirment les données cliniques. Chez les femmes enceintes fumeuses, le taux global de malformations n’est pas modifié par rapport à la population générale. Cependant, certaines malformations rares (fentes faciales, cranio-sténoses, laparoschisis, pieds bots) seraient en augmentation, avec, selon, le travail danois, un risque relatif entre 1,13 et 2,05. Selon ces mêmes études, aucun effet fœtotoxique n’a été mis en évidence, quelle que soit la galénique utilisée.
Il faut ajouter à ces conclusions rassurantes des experts réunis par l’Afssaps que les données de pharmacovigilance disponibles confirment ces impressions. Elles demeurent pour l’instant limitées et une réactualisation était en cours en fin d’année.
Dr G. B. 01/12/2006